L'enfant terrible de la Révolution - Francis Perrin

Enfermé dans l'asile de fous de Charenton, Charles-Hippolyte de La Bussière rejoue devant le marquis de Sade, également incarcéré, la tragi-comédie de son incroyable existence. De la Révolution à l'Empire, il aura croisé Robespierre, Danton, Charlotte Corday ou encore Joséphine de Beauharnais. Plaisant mystificateur, comédien à ses heures, menant une vie bruyante et dissipée, Charles-Hippolyte se plaît à ne rien prendre au sérieux - jusqu'au jour où, pour échapper aux dangers de la Révolution, il intègre le redoutable Comité de salut public. Durant la Terreur, l'enfant terrible de la Révolution fera disparaitre les pièces d'accusation du Tribunal révolutionnaire, au péril de sa vie.

La lecture

Voici un sympathique petit livre sur un personnage fort méconnu et injustement oublié de la Révolution française.
Il y aurait de quoi faire une adaptation cinématographique passionnante.
J'ai, pour ma part, eu connaissance de son existence grâce au livre "La sainte guillotine".
Et voilà un nouveau personnage fantasque et incroyable à rajouter à mon panthéon !
C'est en écoutant un épisode de l'émission Au coeur de l'Histoire (que je vous recommande ! émission dangereuse pour moi car elle incite souvent à des achats livresques) dans laquelle Francis Perrin était invité que j'ai découvert ce livre. Je l'ai ensuite vite déniché et vite entamé.
Je connaissais Francis Perrin en tant qu'acteur, mais pas du tout en tant qu'auteur de roman. Sa plume est à son image, sympathique, drôle et vivante. On sent qu'il aime les jeux de mots cocasses et ceux-ci passent bien dans le ton de ce personnage histrionique. Il fait également honneur au style d'écriture de l"époque sans que cela ne soit jamais ennuyeux ou pesant.

Tout au long de son récit, La Bussière adopte un ton assez badin et, tel le brave soldat Chveik, traverse les événements de l'Histoire relativement indemne. Et puis, soudain, arrive en quelque sorte sa prise de conscience. Il se rend compte du pouvoir, certes un peu dérisoire mais tout de même significatif, qu'il a de pouvoir sauver des innocents, tout en se mettant lui même en péril.
Et, enfin, La Bussière conclut son récit d'une voix plutôt désabusée, bien qu'un peu accusatrice, mais aussi résignée. C'est la voix de quelqu'un qui n'attend plus rien de la vie. C'est un passage très émouvant car très contrasté avec l'apparente insouciance qui a animé son récit jusqu'alors. C'est également une belle leçon et réflexion. Car, malheureusement, on oublie vite ceux qui nous ont fait du bien; on oublie encore plus souvent de les remercier de quelque façon que ce soit.
La Bussière cite ce passage du Misanthrope qui résume son amertume :

Trahi de toutes parts, accablé d'injustice
Je vais sortir d'un gouffre où triomphent les vices
Et chercher sur la terre un endroit écarté
Où d'être homme d'honneur on ait la liberté

L'extrait

Dans mon enfermement, je bénis la bonne fortune qui empêche que je sois exposé à la vie extérieure. Je préfère mon enfer à votre ersatz de paradis.
(...) Je sens que je ne vais pas vivre bien longtemps. J'en suis même à espérer une fin prochaine. Je vais quitter un monde que je ne regretterai pas parce que je n'ai pu vivre la vie dont j'avais rêvé. (...)
Quand vous avez été toute votre vie un plaisantin, un charmeur, un bas-comique, un "inclassé déclassé", peu importe les bonnes actions que vous avez pu faire, vous resterez toujours ce que les autres ont décidé que vous êtes. Aurait-il mieux valu que je sois Fouché, Marat, Carrier, Collot d'Herbois, Robespierre ou Fouquier-Tinville, responsables de milliers de morts, plutôt que celui à qui l'on conteste la véridicité d'avoir sauvé 1153 têtes ? Je ne vous pose pas la question, j'en connais depuis longtemps la réponse.
(...) On peut appeler ma vie une vie ratée. Quel besoin avais-je de la mettre en "lumière" ce soir ? Une secrète envie de clarifier mon parcours ? Qui suis-je exactement ? Diderot a posé la bonne question dans une comédie : Est-il bon, est-il méchant ?
Suis-je bon, suis-je méchant ? Bravache ou héros ? Imbécile ou lucide ? Inconscient ou prophète ? Humain ou cynique ? Je vous laisse le loisir de répondre à ces interrogations.

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